
ARCHITECTONIQUE ET DIFFUSION CULTURELLE :
QUAND LA PLACE DES ARTS DEVIENT PORTE-VOIX
Emblème de la place publique montréalaise aspirant
à l’universalité, la Place des Arts a
été modelée par les contextes
idéologiques et culturels des quarante dernières
années. L’histoire permet de comprendre ce qui a
été édifié en réponse aux
souhaits formulés dans les années cinquante à
soixante-dix. De la démocratisation à la
démocratie culturelle, la diversité de l’offre
et la liberté du choix constituent désormais les
conditions de la pérennité de la Place des
Arts : l’accessibilité en est le maître
mot, les voies de communications en sont les ambassadrices.
Fonctionnels en 1972, l’entrée et le hall du complexe
culturel donnaient auparavant accès aux nombreuses salles du
complexe et au réseau souterrain. Certes, ils accueillaient
les usagers, toutefois sans mettre réellement en valeur
l’offre culturelle, ni les salles de spectacle, la
billetterie, les boutiques, les restaurants et le réseau
piétonnier. Ils représentaient avant tout un lieu de
passage pour les trente-cinq mille travailleurs quotidiens et les
huit millions de marcheurs, de clients et de spectateurs annuels.
À l’instar du réaménagement de
l’esplanade pour en faire un lieu convivial, la
Société de la Place des Arts a mandaté les
firmes Menkès Shooner Dagenais LeTourneux Architectes et
Provencher Roy + Associés pour redéfinir la marquise,
l’entrée principale et les espaces de communications
afin de créer un espace culturel mettant en valeur les
activités de la Place des Arts. À la
rénovation des espaces existants s’est ajouté
l’aménagement d’une aire d’exposition, des
espaces d’animation et de services, une verrière, un
accès à l’esplanade et à l’Adresse
symphonique, une zone multimédia et un plan lumière
extérieur confirmant le rôle du complexe dans le
Quartier des spectacles.
La structure de l’Espace culturel Georges-Émile
Lapalme est fondée sur un plan déployé qui
réunifie les éléments programmatiques en
intégrant identité, multimédia et
signalisation. Il a fallu organiser l’information pour en
faciliter la lecture et ainsi jalonner le nouveau parcours au
bénéfice des usagers. L’aménagement du
réseau de circulation et des espaces adjacents à
l’esplanade, à la Salle Wilfrid-Pelletier, aux
théâtres Maisonneuve, Jean-Duceppe et le
Studio-Théâtre, à la Cinquième Salle et
au Musée d’art contemporain de Montréal,
diffuse l’offre culturelle et oriente et délecte le
promeneur. En plus de repenser chacune des entrées, le
programme a prévu le déplacement de la billetterie et
du kiosque d’information, la création d’un
nouvel espace aménagé pour des
événements publics, ainsi qu’un bar à
vin et un espace d’exposition. Actualités, contraste
et lumière créent un espace sensible et
mémorable. Cette intervention s’ouvre sur la rue
Sainte-Catherine à l’aide d’une nouvelle
marquise symbolique dont la forme rappelle un porte-voix. À
la portée de tous, l’architecture réinvente le
milieu de vie du plus grand complexe culturel.
S’inspirant des éléments graphiques et de
l’architecture de la Place des Arts, ce concept fait
naître un espace cohérent et en harmonie avec
l’identité du lieu. Ponctué de seuils marquant
les transitions, sols, murs et plafonds – grâce
à un système d’éclairage et
d’audiovisuel – créent des passages
sensoriels et enveloppants. Espaces aménagés pour les
animations et les spectacles, ouvertures liant vie souterraine et
extérieure, puits de lumière et mise en valeur des
œuvres
L’Artiste est celui qui fait voir
l’autre côté des choses (Claude Bettinger,
1993) et
Comme si le temps… de la rue (Pierre
Granche, 1991) concourent ensemble à la réalisation
de l’Espace culturel Georges-Émile Lapalme pour
tous.
L’Espace culturel en faisant écho aux
caractéristiques intrinsèques et aux principes de
conception du complexe – importance donnée à la
collectivité, ampleur de l’offre culturelle, lieu de
vie souterrain et extérieur – réaffirme
l’identité bien montréalaise de la Place des
Arts. Ainsi, c’est par sa capacité à se
renouveler que celle-ci assume et conserve le statut du plus grand
centre culturel de Montréal.
Jean Pierre LeTourneux, architecte et Annie d'Amours,
rédactrice
Menkès Shooner Dagenais LeTourneux Architectes